Au-delà de l'horizon

Alexandra Ceccarelli

Difficulté de lecture: 0/3

Résumé:

Et si, au millénaire prochain, quatre-vingt-dix pour cent de la surface de la Terre était recouverte par les eaux? Et si, dans ce milieu hostile qui voit apparaître une nouvelle race d'hommes, mi-humains, mi-poissons, trois hommes se réveillaient d'un long sommeil et cherchaient à survivre, à se retrouver et à se réconcilier?

Aidés par les Hommes de l'eau et par les Chercheurs, une caste importante de ce monde fragile et déchiré, Uther, Francis et Antoine parviendront-ils à vaincre d'étranges médecins gastronomes qui convoitent leur cerveau et les poursuivent sans relâche? Parviendront-ils à faire de leur réveil une résurrection?

Mon avis:

      L'histoire est assez bien ficelée, mais pour moi ce n'est pas la qualité principale de ce livre, cette qualité est l'univers. En effet, je trouve très bien exploitée l'idée de la Terre recouverte par les eaux (même s'il semble qu'elle ne l'ai recouverte que de quelques dizaines de mètres, mais j 'y reviendrai), la situation est bien pensée, de ce que l'on mangerait au devenir du papier (puisque la plupart des arbres ont été engloutis) en passant par notre mode de vie, ajoutez un peu de discrimination raciale et on se croit vraiment dans un monde vraisemblable! Le monde est assez magique et j'ai beaucoup apprécié chaque description de chaque paysage et élément exotique, moi qui adore voir un monde nouveau se constuire sur le papier. Malheureusement certains problèmes viennent entacher cette si belle oportunité de faire un très bon livre.
      Tout d'abord je trouve les personnages très creux, l'histoire d'amour de Mina et Francis est franchement vide. Le scénario est intéressant mais le casting ne suit pas, les relations entre les personnages et les dialogues ne sont pas assez développées donc on ne s'attache pas aux héros. A l'exception non négligeable du vieil homme (dont j'ai oublié le nom, quel malheur!) qui a perdu sa femme, son amitié avec Uther est pour le coup très sincère et attachante puisque bien développée.

       Mais le problème qui m'a préoccupée dès le début du roman est celui des incohérences. Il y a plusieurs incohérences qui ont finalement toutes un lien avec le temps... Premièrement, j'ai beaucoup de mal à passer outre le fait qu'un homme né et vivant il y a 800 ans n'apporte aucune maladie à des gens au système immunitaire donc évolué de 800 ans. Doomsday book de Connie Willis gère cela très bien, les voyageurs temporels étudient les maladies de l'époque dans laquelle ils se rendent pour se vacciner (oui, il y a cela aussi, Francis devrait également attraper quelques vilaines maladies, surtout étant donné que l'atmosphère est sans doute très différente puisque les eaux ont recouvert la terre... ce n'est pas sans conséquences!) et essaient d'avoir le moins de contact possible avec les autochtones pour ne les point contaminer. Deuxièmement, 800 ans est décidément un très mauvais choix, c'est trop court pour qu'une espèce ait muté (hommes-poisson, escargots géants venimeux, dragons) et trop long pour que la langue n'ait pas changé du tout! En effet Francis comprend très bien les autochtones et ils le comprennent très bien, malgré l'évolution que la langue aurait dû subir. Imaginez-vous un voyageur temporel du Moyen-Age vous interpeler de la sorte:   

« Cumpainz Rollant, l’olifan car sunez:
Si l’orrat Carles, ferat l’ost returner,
Succurrat nos li reis od tut sun barnet. »
(Chanson de Roland ≃XIIIe siècle)
Je doute que vous arriviez à lui répondre en vieux français (problème résolu encore une fois par Doomsday Book: les voyageurs apprenent la langue de l'époque)
L'auteure pointe certains de ces défauts, un personnage par-ci ou par-là dira "Hmm.. je doute que, comme tout le monde le dit, les hommes-poissons sont des mutants, il est impossible qu'il aient muté en si peu de temps." mais le personnage ne formulera aucune autre hypothèse, comme si ces remarques étaient là pour dire que ces incohérences sont connues de l'auteure mais qu'elle ne voulait pas approfondir le problème. Et je comprend très bien cela. D'accord cela m'a contrariée car j'ai pour préférence très personnelle que tout me soit expliqué, j'adore la science et j'aime encore plus quand on utilise la science dans la fiction pour en quelque sorte appuyer une "théorie", mais je me suis ensuite rendue compte que ce que j'aimais c'était les romans d'anticipation, qu'en Science-Fiction il y a deux camps: ceux que j'appellerais les anticipateurs qui essaient de s'appuyer au minimum sur des théories scientifiques et ceux qui vendent du rêve, qui font simplement un travail de la pensée pour imaginer ce qui se passerait dans telle situation qu'importe la science, ici, que se passerait-il si les eaux recouvraient la Terre?
      Mais voyez-vous, ce problème mis à part, il en reste encore un qui créé aussi des incohérences: il me semble que l'auteure n'a pas pensé à la logique d'un évènement tel que celui qu'elle traite. Si les océans débordent, ils sont tout de même soumis aux lois de la nature qui font le niveau de la mer égal partout, or nos héros se rendent à Biarritz (d'une altitude variant de 0 à 85 m) alors que notre belle ville de Saint-Tropez (d'altitude jusqu'à 115 m)  est entièrement recouverte par les eaux!
Une mention honorable: j'ai bien ri quand j'ai lu que les châtaignes sont des tubercules.

CONCLUSION
      Les idées de ce livre sont bonnes et l'ambiance géniale mais cela est éclipsé par le développement trop timide de la quasi-totalité des personnages et les incohérences citées au-dessus. Je dis "éclipsé" mais c'est purement personnel puisque j'adore que l'on m'explique toutes les raisons logiques à un fait, de plus j'ai tout de même grandement apprécié découvrir ce monde magnifiquement pensé. Au final, pour moi, l'intérêt de ce livre n'est pas scientifique mais plutôt de faire voyager l'esprit.

Ma note: